Après Iron Man qui inaugurait la reprise en main par la Marvel de ses héros portés à l’écran, voici le retour du colosse vert parfumé aux rayons Gamma. Un nouveau départ censé faire oublier la précédente version de 2003 réalisée par Ang Lee et jugée catastrophique. Le moins que l'on puisse dire c'est que l'on est loin du compte.
S'appuyant sur un scénario qui exploite le thème essoré du super soldat, le film se contente d'aligner les clichés les plus prévisibles sous le prétexte paresseux de la fidélité à l'histoire d'origine. Pas une seule minute qui soit surprenante : tout est vu, revu et passablement faisandé au-delà du tolérable, en particulier lorsqu’on se targue de rénovation.
La réalisation impersonnelle de Louis Leterrier ne compense malheureusement pas cette vilaine trame en égrenant platement toutes les tartes à la crème visuelles en vigueur dans le film d'action de la décennie, musique tambourinante au kilomètre comprise. Jusqu'à d'invraisemblables incohérences où la même poursuite voit alterner des plans de nuit totale, de plein jour et de petit matin, où des trombes d'eau se déversent juste au bon moment sans prévenir, où des batailles rangées se déroulent sur un campus d’université totalement désert, où l’on fabrique un vaccin dans une cuisine avec trois éprouvettes et autres stupidités du même tonneau. Où sous prétexte de divertissement on prend le spectateur pour un crétin…
Le thème original du bourrin vert n’étant pas à la base d’une richesse époustouflante, et passée la déception d’un traitement qui joue ouvertement la démission côté imagination, on pouvait espérer quelques compensations spectaculaires dernier cri là où le film d’Ang Lee échouait cruellement. Hélas nous n’aurons droit cette fois encore qu’à des créatures artificielles d’une rare laideur tant esthétique que technique. L’ennuyeux combat de catch final sur fond de grosses voix déformées et de rugissements est aussi creux sur le plan visuel que dramatique. Comme les autres personnages, on se contente de regarder, incrédules, ces improbables séquences de "dessins animés" sans intensité ni enjeux.
Quant aux acteurs plutôt hauts de gamme qui se sont fourvoyés dans cette aventure, ils font certes correctement leur boulot, mais ne sont pas pour autant très bien choisis. En particulier un Tim Roth dont le talent n’est plus à démontrer mais qui, outre les trois phrases moisies qui lui sont dévolues, n’a pas vraiment le physique du rôle. Quant à Liv Tyler en scientifique de pointe no comment… Edward Norton fait au mieux avec ce qu’on lui donne tandis William Hurt s’en sort honorablement dans un rôle en carton. Bref, comme un petit sentiment de confiture aux cochons, même si ces présences prestigieuses et le ton sérieux permettent au film d’échapper au statut d’indigent nanar façon Les 4 Fantastiques pour se contenter de n’être qu’un mauvais film sans saveur. Quant à la comparaison avec la version honnie de 2003, l’aspect dit "psychologique" me semble mieux traitée par Ang Lee et ses comédiens qui n’ont décidément pas à rougir devant ce triste avatar.
Après l’inattendu Iron Man doté d’un scénario à peine plus passionnant mais tout entier porté (détourné ?) par l’acteur et un réalisateur qui a la sagesse de le laisser faire, cette nouvelle mouture Marvel n’augure rien de bon. Elle démontre que la " fidélité" n’est pas nécessairement un gage de qualité et que la thématique des super-héros manque trop souvent de substance pour n’être confiée qu’à des réalisateurs dociles se contentant de filmer un storyboard conçu par une armada de scribouillards aux ordres.
Depuis le Superman de Donner jusqu’aux récents Batman de Chris Nolan en passant par Tim Burton et évidemment les X-Men de Bryan Singer, les producteurs devraient savoir que les réappropriations sévères de la part de cinéastes de caractère constituent la seule manière viable de porter à l'écran des histoires souvent simplistes et datées. Robby pas content.
samedi 21 février 2009
vendredi 6 février 2009
A Couteaux Tirés
Film à la carrière discrète (on dit aussi "échec commercial"), The Edge se révèle pourtant une solide production comme il en existe peu sur le thème de l'aventure avec un grand "A". Réunissant les impeccables Anthony Hopkins et Alec Baldwin aux prises avec un environnement sauvage somptueux mais pour le moins hostile, Lee Tamahori nous emporte loin, très loin, quelque part entre les récits d'aventure de notre jeunesse et le thriller machiavélique.
Richement produit par Art Linson juste après Heat déjà écrit par le très polyvalent et talentueux David Mamet (Glengarry, Verdict, Hoffa), le film s'est dans un premier temps construit autour d'Harrison Ford et Dustin Hoffman. Mais le duo d'acteurs finalement retenu fut sans aucun doute le meilleur choix possible pour servir cette intrigue moins simpliste qu'il n'y paraît.
La petite équipe d'un séduisant photographe de mode (Baldwin) part en Alaska pour mitrailler dans un environnement sauvage une célèbre top model mariée à un milliardaire vieillissant et passablement jaloux (Hopkins). A la suite d'un crash durant un vol de reconnaissance, l'amant présumé, son assistant et le mari suspicieux se retrouvent perdus au milieu de l'Alaska montagneuse. Commence alors une marche aussi longue qu’éprouvante, où il faut constamment lutter pour sa propre survie... sans négliger de surveiller du coin de l'oeil son compagnon d'infortune.
Outre les innombrables et très efficaces péripéties auxquelles on pouvait s'attendre (ours kodiak terrifiant en guest star), toute l'astuce du scénario consiste à y imbriquer une forte dimension psychologique liée aux caractères et aux enjeux symbolisés par les deux protagonistes principaux. Conscient que son statut de milliardaire suscite un constant mélange d'envie, d'admiration teintée de jalousie voire de haine, Morse/Hopkins est un homme froid, sur la réserve mais discrètement généreux, tout entier tourné vers l'efficacité et le rationnel. Le talent de l'acteur consiste à transmettre également une ombre de vulnérabilité au parfum de désespoir qui semble inséparable de la trop grande lucidité du personnage.
Face à lui Alec Baldwin excelle à nouveau dans cet emploi de charmeur énergique aux intentions pas très claires. Rôle qu'il avait déjà visité avec succès dans les tortueux Malice où La Jurée. Grâce au parti pris de suivre en permanence les rescapés sans jamais alterner avec d’hypothétiques recherches ou tout autre retour à la "civilisation", les personnages prennent le temps d’évoluer au gré des épreuves. Mais sans toutefois se transformer radicalement : David Mamet évite en effet les gros sabots d'une niaise rédemption comme le cinéma populaire américain nous en sert trop souvent.
L'autre personnage incontournable du film est évidemment ce décor du bout du monde magnifié par une réalisation ample, rigoureuse, joliment classique et soutenue par une lumineuse photographie. Loin du tout numérique et des effets tourbillonnants si courants depuis, A Couteaux Tirés prend résolument le pari du réalisme en allant tourner presque entièrement en extérieur. Rares sont les films qui savent si bien tirer parti d'un tel cadre d'exception. Une option qui s'avère très payante tant pour l’immersion du spectateur que pour l’efficacité des rebondissements. Bien sûr il s’agit là d’un réalisme tempéré par une bonne dose de coups de bol, mais n'est-ce pas là souvent le prix à payer pour vivre de telles aventures ? On pourra également déplorer une fin un peu abrupte, un fond idéologique légèrement rance ou bien encore la très paresseuse musique de Jerry Goldsmith. Mais le souffle du film et le plaisir d'être diverti sans être pris pour des abrutis l'emporte aisément sur ces quelques menues faiblesses.
Richement produit par Art Linson juste après Heat déjà écrit par le très polyvalent et talentueux David Mamet (Glengarry, Verdict, Hoffa), le film s'est dans un premier temps construit autour d'Harrison Ford et Dustin Hoffman. Mais le duo d'acteurs finalement retenu fut sans aucun doute le meilleur choix possible pour servir cette intrigue moins simpliste qu'il n'y paraît.
La petite équipe d'un séduisant photographe de mode (Baldwin) part en Alaska pour mitrailler dans un environnement sauvage une célèbre top model mariée à un milliardaire vieillissant et passablement jaloux (Hopkins). A la suite d'un crash durant un vol de reconnaissance, l'amant présumé, son assistant et le mari suspicieux se retrouvent perdus au milieu de l'Alaska montagneuse. Commence alors une marche aussi longue qu’éprouvante, où il faut constamment lutter pour sa propre survie... sans négliger de surveiller du coin de l'oeil son compagnon d'infortune.
Outre les innombrables et très efficaces péripéties auxquelles on pouvait s'attendre (ours kodiak terrifiant en guest star), toute l'astuce du scénario consiste à y imbriquer une forte dimension psychologique liée aux caractères et aux enjeux symbolisés par les deux protagonistes principaux. Conscient que son statut de milliardaire suscite un constant mélange d'envie, d'admiration teintée de jalousie voire de haine, Morse/Hopkins est un homme froid, sur la réserve mais discrètement généreux, tout entier tourné vers l'efficacité et le rationnel. Le talent de l'acteur consiste à transmettre également une ombre de vulnérabilité au parfum de désespoir qui semble inséparable de la trop grande lucidité du personnage.
Face à lui Alec Baldwin excelle à nouveau dans cet emploi de charmeur énergique aux intentions pas très claires. Rôle qu'il avait déjà visité avec succès dans les tortueux Malice où La Jurée. Grâce au parti pris de suivre en permanence les rescapés sans jamais alterner avec d’hypothétiques recherches ou tout autre retour à la "civilisation", les personnages prennent le temps d’évoluer au gré des épreuves. Mais sans toutefois se transformer radicalement : David Mamet évite en effet les gros sabots d'une niaise rédemption comme le cinéma populaire américain nous en sert trop souvent.
L'autre personnage incontournable du film est évidemment ce décor du bout du monde magnifié par une réalisation ample, rigoureuse, joliment classique et soutenue par une lumineuse photographie. Loin du tout numérique et des effets tourbillonnants si courants depuis, A Couteaux Tirés prend résolument le pari du réalisme en allant tourner presque entièrement en extérieur. Rares sont les films qui savent si bien tirer parti d'un tel cadre d'exception. Une option qui s'avère très payante tant pour l’immersion du spectateur que pour l’efficacité des rebondissements. Bien sûr il s’agit là d’un réalisme tempéré par une bonne dose de coups de bol, mais n'est-ce pas là souvent le prix à payer pour vivre de telles aventures ? On pourra également déplorer une fin un peu abrupte, un fond idéologique légèrement rance ou bien encore la très paresseuse musique de Jerry Goldsmith. Mais le souffle du film et le plaisir d'être diverti sans être pris pour des abrutis l'emporte aisément sur ces quelques menues faiblesses.
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