dimanche 28 septembre 2008

The Mist

Pour sa troisième adaptation d’une œuvre de Stephen King, Frank Darabont n'a pas connu le succès rencontré avec Les Evadés et surtout La Ligne Verte. C'est d'ailleurs sans doute grâce au succès colossal du second que le réalisateur pu monter The Mist en dépit d'un scénario pour le moins sombre et politiquement pas très correct. Malheureusement, malgré une bonne volonté manifeste et un indéniable savoir-faire de la part du cinéaste, le film reste bien difficile à défendre.

Le scénario est très fidèle à la longue nouvelle du même nom écrite par Stephen King. Il y est question d'une petite ville qui, à la suite d'une effroyable tempête, est envahie par une brume opaque et mystérieuse venue des montagnes où se cache une base militaire top secrète. Un bon père de famille, son jeune fils et son voisin se retrouvent bientôt bloqués dans un supermarché en compagnie d’une partie de la population du coin venu faire ses courses. Bloqués, ou plutôt assiégés puisque ce petit monde apprend assez vite à ses dépends que le sinistre brouillard cache d'innombrables créatures terrifiantes.

Toute l'originalité de l’idée de départ était de traiter l'aventure et ses péripéties, mais également les tensions extrêmes qui s’établissent rapidement dans le refuge improvisé. En effet, si les monstres sont à l’extérieur, les vieux démons qui hantent les esprits se révèlent vite tout aussi redoutables. Seulement voilà, la mayonnaise ne prend pas. Il a beaucoup été reproché au film ses effets spéciaux jugés moyens qui seraient responsables de son échec artistique. Pourtant, hormis quelques volatiles à l'aspect discutable, les trucages sont dans l'ensemble plutôt de bonne facture et même parfois impressionnants, comme ces titanesques créatures parcourant la brume tels des fantômes lovecraftiens. Non : les causes de l'échec, plus graves, sont à chercher ailleurs .

Outre un souci de rythme lié à la longueur du film et de laborieuses explications d'autant plus dispensables qu'elles sont très mal introduites, se pose avant tout un réel problème de casting. Si pour les deux adaptations précédentes Frank Darabont avait su choisir d'excellents acteurs de la trempe de Morgan Freeman, Tom Hanks ou Tim Robbins, nous devons nous contenter ici d'acteurs de seconde zone au mieux transparents, au pire activement mauvais. Au premier rang desquels Thomas Jane qui, non content de présenter des faux airs de Christophe Lambert, s'attache aussi à en avoir la filmographie. Collectionnant les nanars de luxe auxquels il va comme un gant (Peur Bleue, Punisher, Dreamcatcher), l'acteur passe comme une ombre alors qu'il incarne ici le personnage principal. Même problème avec Laurie Holden, obscure actrice de série (dans tous les sens du terme) certes bien mignonne mais au jeu glacial ultra limité. Plus surprenant est le cas d’un élément central du récit, la très pieuse Mme Carmody incarnée par Marcia Gay Harden, actrice chevronnée mais qui ici en fait étrangement des tonnes, ramenant ainsi un personnage déjà outré au rang de lourde caricature.

Tout cela n'aurait pas autant d'importance si The Mist n'était qu'un simple survival basique où l'on court, hurle et escalade n'importe quoi en tirant sur n'importe qui. Mais face à l'ambition de présenter une vision fouillée des comportements d’une petite communauté confrontée au danger et à l'inconnu, ce flottement dans l'interprétation est fatal. On reste désespérément extérieur au drame qui se joue devant nous, en saluant malgré tout la démarche audacieuse du cinéaste. Car même si la démonstration est un peu lourde, cette vision d’une religiosité obscurantiste et sacrificielle, friande de boucs émissaires, se nourrissant de l’ignorance et de la détresse de ses ouailles surprend beaucoup dans ce type de production généralement très respectueuse de l’ordre moral. D’autant qu’il s’agit d’un environnement familier qui écarte la possibilité de coller une barbe et un turban à ces fous de Dieu ici aux joues bien roses. Le mérite en revient évidemment surtout à Stephen King, pourtant croyant convaincu, mais qui s’est toujours attaché à violemment s’en prendre aux dérives religieuses tout au long de son oeuvre.

La fin du film imaginée par le cinéaste, seul véritable ajout à la nouvelle originale, sidère tout autant par son redoutable pessimisme et sa volonté d'aller résolument en découdre avec les poncifs du formatage hollywoodien. Il est donc d'autant plus rageant de voir Frank Darabont échouer dans cette louable tentative pour ne livrer qu’un honnête spectacle là où il y avait matière à marquer une date dans le cinéma de genre.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Intéressant. J'ai quand même envie de voir le film par curiosité...

Anonyme a dit…

Article très bien construit et très bien rédigé. Cependant je ne suis pas totalement d'accord avec ce qui est écrit, j'ai personnellement beaucoup aimé ce film : ambiance pesante et pessimiste, je suis tout de suite entrée dans l'univers de ce film et cette fin m'a totalement retournée, je ne pensais pas que la noirceur de l'ambiance générale irait jusque là.

Merci d'être passé sur mon blog aussi ;)

A bientôt

Anonyme a dit…

Bonjour,

J'ai trouvé ce film assez ennuyeux, parfois soûlant même (le personnage de Marcia Gay Harden est vraiment insupportable)...

Reste un final d'un onirisme magnifique avant de glisser vers surprenante une noirceur. Malheureusement, ça ne suffit pas à sauver le film...

Parait-il qu'il existe une version director's cut (en noir et blanc). Je serai curieux de voir ce que ça donne. Il doit bien y avoir des modifications... Sinon, ça serait vraiment la plus belle escroquerie marketing de tous les temps ! ^__^

Amicalement,

Shin.

RobbyMovies a dit…

Bonjour Shin,
A ma connaissance, la version NB n'est pas différente de celle en couleur. Mais je ne l'ai pas vu donc je ne peux l'affirmer.
Robby

Anonyme a dit…

'tain l'arnaque alors !!

Il suffit juste de virer la couleur de la version cinéma et le tour est joué !

Franchement, ça me sidère...

RobbyMovies a dit…

Oh plus rien ne m'étonne en terme de "suppléments" bidons, collectors en carton et autres éditions spéciales à 2 balles. Robby.

Anonyme a dit…

Personnellement, j'ai beaucoup apprécié ce film, qui m'a rappelé à la fois les films de monstres des années 50 ou même "The Fog", de John Carpenter. Les acteurs y sont bons, en particulier Toby Jones et Laurie Holden (qui n'est pas une obscure actrice de séries, elle a joué dans "X-Files", "The Shield", "The Walking Dead" mais aussi dans les films comme The Majestic où elle était la fiancée de Jim Carrey et Silent Hill, dans le rôle de la policière Cybil Bennett).