Voilà, cette fois c’est la "bonne" : la saga Harry Potter est morte. Déjà douché par le précédent épisode (ah comme ce terme est désormais tristement adapté…) et son scénario poussif, c’est presque en croisant les doigts que je suis allé voir celui-ci : la bande-annonce était prometteuse, les plates errances de l’Ordre du Phoénix semblaient avoir été évitées au profit d’une ambiance plus tendue et surtout en retrouvant le faste des autres films. Seulement voilà, ce trailer d’1 minute 30 est d’une malhonnêteté rare qui frise l’escroquerie : la totalité des plans spectaculaires y sont visibles, jusqu’à une apparition de Voldemort adulte qui ne figure jamais dans le film lui-même.
Mais alors de quoi sont donc constituées les 2h30 restantes me direz-vous ? Eh bien par la pire évolution imaginable : un fade mélange de bit-lit et de teen movies où la préoccupation sentimentale rose bonbon prend presque toute la place. On passe d’un couloir à un autre, d’une salle de classe à la cafet’, pardon, à l’auberge du coin comme dans un soap pour ado mais où chaque décor serait fastueux (à défaut d’être surprenant puisqu’on les connaît déjà presque tous). Hermione est-elle jalouse, Ron amoureux ? Harry, dont Romilda est amoureuse, va-t-il embrasser Ginny qui sort avec Dean ? La copine de Ron va-t-elle évincer Hermione qui elle-même louche par dépit sur le beau Cormiac ? Vous vous en foutez ? Moi aussi !
Tant que ces préoccupations pré pubères n’étaient qu’un ingrédient de plus comme dans La Coupe de Feu, elles enrichissaient habilement la saga. Dès lors qu’elles deviennent centrales au détriment de l’intrigue et surtout du spectacle comme c’est le cas ici, on échoue dans le plus redoutable ennui. Car enfin J.K. Rowling n’est pas Shakespeare et, même en affectant une pose "dark" à la mode censée donner une crédibilité à n'importe quelle histoire à 2 sous, toutes ces aventures minuscules sont d’une désarmante platitude. Et comme les jeunes acteurs ou la réalisation ne sont pas assez denses pour faire oublier cette pauvreté d’écriture, le film n’est qu’une suite d’ennuyeuses et répétitives scénettes artificielles.
De temps à autre le scénariste (ou l'auteur ?) se rappelle qu’il s’agissait à l’origine d’affrontements entre puissants sorciers et l’on s’agrippe à ces quelques scènes comme un naufragé à son radeau. Rares, elles sont aussi malheureusement mal fichues et sans aucune densité dramatique. On retrouve d’ailleurs ici la marque de David Yates qui, comme pour le précédent opus, foire méticuleusement tous ses climax, même les plus porteurs !
Alors certes, le jeune public féminin passe la séance à glousser à chaque répartie d’Hermione ou à la balourdise de Ron, tandis que les lecteurs fans semblent satisfaits de ces nouvelles adaptations plus proches, paraît-il, des romans. Mais l’amateur de cinéma, d’imaginaire trépidant et bon enfant, de grand spectacle épique et de mystère au goût de contes de fées astucieusement remis au goût du jour qui caractérisaient la série jusqu’au quatrième film n’y grappillera que quelques pauvres miettes rassies parsemant un long bout à bout soporifique.
lundi 27 juillet 2009
vendredi 24 juillet 2009
Le Jour où la Terre s'Arrêta
Oui bien sûr, il est convenu de se pincer le nez dès l'annonce du moindre remake, en particulier lorsqu'il s'agit d'un classique où la démarche vire alors carrément au sacrilège. Le film original signé Robert Wise appartenant au club - plus guère sélect - du film culte, cette nouvelle mouture souleva évidemment l'hostilité de principe des gardiens du temple dès son annonce. Pourtant que risquait-on ? Que le film soit meilleur et fasse pâlir à jamais l'original comme le fit John Carpenter avec The Thing cet autre classique de la S.F. datant de la même année ? Tant mieux ! Ou bien qu'il s'agisse d'un foirage qui rehausse encore le prestige de l'original ? Les adeptes du culte ne pourraient qu'en être satisfaits.
Je suis resté longtemps sur le souvenir ébahi de la version de 1951 très originale à une époque où les vilains extra-terrestres, symboles du perfide soviet, étaient de rigueur. Robert Wise proposait de mettre tout le monde face à ses responsabilités via l'arrivée d'un seul personnage à la fois menaçant et pacifique, puissant et faible. Accompagné de Gort, robot géant au pouvoir illimité qui devint l'icône du film, l'alien Klaatu délivrait un message en forme d'ultimatum : soit les humains cessaient d'être des créatures vindicatives et guerrières, soit ils étaient éliminés de l’univers. Message évidemment de circonstance en pleine Guerre Froide mais discutable par ailleurs : la formulation de Klaatu ressemblait un peu trop à l’injonction de l’Amérique impériale – "ressemblez-nous ou disparaissez" - pour n’être qu’un généreux message de paix.
À la faveur d'un visionnage plus récent, mon enthousiasme devint plus nuancé encore : tout cela était bel et bien, mais manquait terriblement de vie : une sympathique fable parfois simpliste, plutôt raide à la forme forcement datée. Bref, une nouvelle vision à la fois respectueuse et exigeante pouvait être prometteuse dès lors qu’on ne la confiait pas à n’importe qui. Malheureusement le choix paresseux de Scott Derrickson à la réalisation et David Scarpa au scénario révéla surtout un cruel manque d’ambition et de personnalité.
Car loin d’enrichir l’histoire, le tandem réussit l’exploit d’en souligner davantage encore les faiblesses et d’en appauvrir les aspects les plus intéressants : le gamin déjà peu crédible dans la version originale devient ici un insupportable moutard qui donnerait plutôt envie d’en finir au plus vite avec la race humaine. Au passage, cette version y perd gravement en maturité pour lorgner vers le public teenager.
Les allusions subtilement "christiques" de 1951 sont ici accentuées par une imagerie extra-terrestre pachydermique qui fleure bon l’apparition divine sulpicienne, jusqu’à l’arme de destruction punitive de Klaatu prenant la forme d'improbables nuées de criquets évoquant cette bonne vieille plaie d’Egypte. Une "trouvaille" qui permet même au titre du film de devenir hors sujet. Chapeau bas. L’autre idée lumineuse étant d’asperger le film de cette écologie désincarnée qui semble décidément être le seul sujet digne d’intérêt en lieu et place de la guerre ou autres souffrances humaines, comme si la Terre était devenue aujourd’hui un confortable havre de paix pour le plus grand nombre.
Côté personnages, Jennifer Connelly et Kathy Bates s’acquittent honorablement de leur rôle. Klaatu est lui interprété par un Keanu Reeves plus pâteux et inexpressif que jamais, illustrant cette vieille idée crétine et puritaine selon laquelle une civilisation plus avancée a forcement évacué les émotions et parle avec un balais enfoncé là où ça fait mal. Quant au célèbre Gort, il passe à la trappe pour n’apparaître que durant quelques plans fugitifs plutôt vilains et artificiels qui feraient presque regretter les genoux plissés de son caoutchouteux modèle.
Reste donc un carambolage de scènes plutôt mal écrites et platement réalisées, farcies d’effets sans aucune originalité. Cette version atteint donc involontairement l’un de ses objectifs : redonner du lustre au film de Robert Wise infiniment plus fin et maîtrisé que cette insipide gelée mystico-mélodramatique. Dommage, il y avait matière à une très belle relecture. Try again.
Je suis resté longtemps sur le souvenir ébahi de la version de 1951 très originale à une époque où les vilains extra-terrestres, symboles du perfide soviet, étaient de rigueur. Robert Wise proposait de mettre tout le monde face à ses responsabilités via l'arrivée d'un seul personnage à la fois menaçant et pacifique, puissant et faible. Accompagné de Gort, robot géant au pouvoir illimité qui devint l'icône du film, l'alien Klaatu délivrait un message en forme d'ultimatum : soit les humains cessaient d'être des créatures vindicatives et guerrières, soit ils étaient éliminés de l’univers. Message évidemment de circonstance en pleine Guerre Froide mais discutable par ailleurs : la formulation de Klaatu ressemblait un peu trop à l’injonction de l’Amérique impériale – "ressemblez-nous ou disparaissez" - pour n’être qu’un généreux message de paix.
À la faveur d'un visionnage plus récent, mon enthousiasme devint plus nuancé encore : tout cela était bel et bien, mais manquait terriblement de vie : une sympathique fable parfois simpliste, plutôt raide à la forme forcement datée. Bref, une nouvelle vision à la fois respectueuse et exigeante pouvait être prometteuse dès lors qu’on ne la confiait pas à n’importe qui. Malheureusement le choix paresseux de Scott Derrickson à la réalisation et David Scarpa au scénario révéla surtout un cruel manque d’ambition et de personnalité.
Car loin d’enrichir l’histoire, le tandem réussit l’exploit d’en souligner davantage encore les faiblesses et d’en appauvrir les aspects les plus intéressants : le gamin déjà peu crédible dans la version originale devient ici un insupportable moutard qui donnerait plutôt envie d’en finir au plus vite avec la race humaine. Au passage, cette version y perd gravement en maturité pour lorgner vers le public teenager.
Les allusions subtilement "christiques" de 1951 sont ici accentuées par une imagerie extra-terrestre pachydermique qui fleure bon l’apparition divine sulpicienne, jusqu’à l’arme de destruction punitive de Klaatu prenant la forme d'improbables nuées de criquets évoquant cette bonne vieille plaie d’Egypte. Une "trouvaille" qui permet même au titre du film de devenir hors sujet. Chapeau bas. L’autre idée lumineuse étant d’asperger le film de cette écologie désincarnée qui semble décidément être le seul sujet digne d’intérêt en lieu et place de la guerre ou autres souffrances humaines, comme si la Terre était devenue aujourd’hui un confortable havre de paix pour le plus grand nombre.
Côté personnages, Jennifer Connelly et Kathy Bates s’acquittent honorablement de leur rôle. Klaatu est lui interprété par un Keanu Reeves plus pâteux et inexpressif que jamais, illustrant cette vieille idée crétine et puritaine selon laquelle une civilisation plus avancée a forcement évacué les émotions et parle avec un balais enfoncé là où ça fait mal. Quant au célèbre Gort, il passe à la trappe pour n’apparaître que durant quelques plans fugitifs plutôt vilains et artificiels qui feraient presque regretter les genoux plissés de son caoutchouteux modèle.
Reste donc un carambolage de scènes plutôt mal écrites et platement réalisées, farcies d’effets sans aucune originalité. Cette version atteint donc involontairement l’un de ses objectifs : redonner du lustre au film de Robert Wise infiniment plus fin et maîtrisé que cette insipide gelée mystico-mélodramatique. Dommage, il y avait matière à une très belle relecture. Try again.
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Même pas drôle
lundi 13 juillet 2009
Wallace & Gromit : Le Mystère du Lapin-Garou
On retrouve dans ce premier long métrage co-produit par Dreamworks beaucoup de ce que l'on a aimé dans les célèbres et oscarisés courts-métrages de la firme Aardman mettant en scène les deux compères en pâte à modeler créés par Nick Park.
Évidemment c'est magnifique : quel bonheur de découvrir tous ces petits décors d’une précision infinie foisonnants de textures fines et colorées qui nous changent de la 3D - même de qualité - si présente dans le cinéma d’animation d'aujourd'hui. Tout le charme incomparable de l’animation traditionnelle est là, jusque dans ses imperfections qui enchantent et transportent le spectateur dans une sorte d’immense coffre à jouets.
C'est hilarant aussi, en tapant tous azimuts tant dans les dialogues que les gags purement visuels et même les nombreux clins d'oeil de cinéphiles judicieusement amenés. Et puis bien sûr les inventions délirantes de Wallace...
Ce qui chagrine un peu c'est ce que l’on n’y retrouve pas : cet esprit étrange, décalé, presque inquiétant d'Un Mauvais Pantalon avec son drôle de pingouin muet et vicieux. Ou bien les trouvailles visuelles comme la folle poursuite en train électrique durant laquelle Gromit fabrique la voie au fur et à mesure. On a ici affaire à une sympathique histoire, certes gentiment foldingue, mais un peu trop classique malgré une belle grosse surprise. Le personnage du prétendant chasseur par exemple est un cliché absolu de comédie tandis que la poursuite finale n'a résolument pas le punch et l'originalité de celles des films courts.
Heureusement le charme opère cette fois encore grâce notamment au "talent" du très lucide et craquant Gromit qui est sans doute l’un des personnages les plus réussis de l'histoire de l'animation image par image : un chien qui ne parle pas, qui n'a même pas de bouche mais qui parvient à exprimer les sentiments les plus subtils grâce à un regard que bien des acteurs de chair et d’os pourraient lui envier...
Aardman est au volume ce que Pixar est à la 3D, le charme "du réel" et l'humour british en plus.
Évidemment c'est magnifique : quel bonheur de découvrir tous ces petits décors d’une précision infinie foisonnants de textures fines et colorées qui nous changent de la 3D - même de qualité - si présente dans le cinéma d’animation d'aujourd'hui. Tout le charme incomparable de l’animation traditionnelle est là, jusque dans ses imperfections qui enchantent et transportent le spectateur dans une sorte d’immense coffre à jouets.
C'est hilarant aussi, en tapant tous azimuts tant dans les dialogues que les gags purement visuels et même les nombreux clins d'oeil de cinéphiles judicieusement amenés. Et puis bien sûr les inventions délirantes de Wallace...
Ce qui chagrine un peu c'est ce que l’on n’y retrouve pas : cet esprit étrange, décalé, presque inquiétant d'Un Mauvais Pantalon avec son drôle de pingouin muet et vicieux. Ou bien les trouvailles visuelles comme la folle poursuite en train électrique durant laquelle Gromit fabrique la voie au fur et à mesure. On a ici affaire à une sympathique histoire, certes gentiment foldingue, mais un peu trop classique malgré une belle grosse surprise. Le personnage du prétendant chasseur par exemple est un cliché absolu de comédie tandis que la poursuite finale n'a résolument pas le punch et l'originalité de celles des films courts.
Heureusement le charme opère cette fois encore grâce notamment au "talent" du très lucide et craquant Gromit qui est sans doute l’un des personnages les plus réussis de l'histoire de l'animation image par image : un chien qui ne parle pas, qui n'a même pas de bouche mais qui parvient à exprimer les sentiments les plus subtils grâce à un regard que bien des acteurs de chair et d’os pourraient lui envier...
Aardman est au volume ce que Pixar est à la 3D, le charme "du réel" et l'humour british en plus.
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Tchitchaaa
mercredi 8 juillet 2009
L'Auberge Espagnole
Pendant deux heures d'une mollesse invraisemblable, Cédric Klapisch nous conte poussivement les pérégrinations d'un petit jeune homme falot et propret qui n'arrête pas de trouver sa vie bordelique, pas "rangée" parce qu'il... ben justement on ne sait pas ! Car sa vie est tout sauf désordonnée et qu’il est le prototype du jeune homme rangé.
D'ailleurs à l'image du personnage, les plus grandes péripéties du film sont : le héros qui couche avec une femme infidèle ; l'amant d'une colloc' qui débarque pendant qu'elle est avec un autre ; le héros qui quitte son job administratif au Ministère des Finances pour devenir écrivain. C’est dire si on vibre.
Bref, même aromatisé au très bobohème Erasmus, ce n'est que du théâtre de boulevard pour jeunes gens de "milieu socio-culturel privilégié" comme l' on dit dans les statistiques sociologiques. C'est plein de bons sentiments communautaires et l'on a droit à tous les clichetons sur le thème, jusqu'à un discours chaussé de plomb sur "l'identité". Quelques moments agréables et quelques trouvailles du côté de la réalisation jalonnent une grosse confiture affreusement conventionnelle sans esprit ni finesse.
Mais le pire est encore cette voix off qui ponctue le film en déclamant des propos définitifs sur la vie, la mort, les vaches, avec un bouquet final sur les rêves d'enfance et autres vapeurs de luxes vues et lues mille fois au point où ça en devient embarrassant. Danièle Thompson doit adorer.
D'ailleurs à l'image du personnage, les plus grandes péripéties du film sont : le héros qui couche avec une femme infidèle ; l'amant d'une colloc' qui débarque pendant qu'elle est avec un autre ; le héros qui quitte son job administratif au Ministère des Finances pour devenir écrivain. C’est dire si on vibre.
Bref, même aromatisé au très bobohème Erasmus, ce n'est que du théâtre de boulevard pour jeunes gens de "milieu socio-culturel privilégié" comme l' on dit dans les statistiques sociologiques. C'est plein de bons sentiments communautaires et l'on a droit à tous les clichetons sur le thème, jusqu'à un discours chaussé de plomb sur "l'identité". Quelques moments agréables et quelques trouvailles du côté de la réalisation jalonnent une grosse confiture affreusement conventionnelle sans esprit ni finesse.
Mais le pire est encore cette voix off qui ponctue le film en déclamant des propos définitifs sur la vie, la mort, les vaches, avec un bouquet final sur les rêves d'enfance et autres vapeurs de luxes vues et lues mille fois au point où ça en devient embarrassant. Danièle Thompson doit adorer.
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