samedi 21 février 2009

L'Incroyable Hulk

Après Iron Man qui inaugurait la reprise en main par la Marvel de ses héros portés à l’écran, voici le retour du colosse vert parfumé aux rayons Gamma. Un nouveau départ censé faire oublier la précédente version de 2003 réalisée par Ang Lee et jugée catastrophique. Le moins que l'on puisse dire c'est que l'on est loin du compte.

S'appuyant sur un scénario qui exploite le thème essoré du super soldat, le film se contente d'aligner les clichés les plus prévisibles sous le prétexte paresseux de la fidélité à l'histoire d'origine. Pas une seule minute qui soit surprenante : tout est vu, revu et passablement faisandé au-delà du tolérable, en particulier lorsqu’on se targue de rénovation.

La réalisation impersonnelle de Louis Leterrier ne compense malheureusement pas cette vilaine trame en égrenant platement toutes les tartes à la crème visuelles en vigueur dans le film d'action de la décennie, musique tambourinante au kilomètre comprise. Jusqu'à d'invraisemblables incohérences où la même poursuite voit alterner des plans de nuit totale, de plein jour et de petit matin, où des trombes d'eau se déversent juste au bon moment sans prévenir, où des batailles rangées se déroulent sur un campus d’université totalement désert, où l’on fabrique un vaccin dans une cuisine avec trois éprouvettes et autres stupidités du même tonneau. Où sous prétexte de divertissement on prend le spectateur pour un crétin…

Le thème original du bourrin vert n’étant pas à la base d’une richesse époustouflante, et passée la déception d’un traitement qui joue ouvertement la démission côté imagination, on pouvait espérer quelques compensations spectaculaires dernier cri là où le film d’Ang Lee échouait cruellement. Hélas nous n’aurons droit cette fois encore qu’à des créatures artificielles d’une rare laideur tant esthétique que technique. L’ennuyeux combat de catch final sur fond de grosses voix déformées et de rugissements est aussi creux sur le plan visuel que dramatique. Comme les autres personnages, on se contente de regarder, incrédules, ces improbables séquences de "dessins animés" sans intensité ni enjeux.

Quant aux acteurs plutôt hauts de gamme qui se sont fourvoyés dans cette aventure, ils font certes correctement leur boulot, mais ne sont pas pour autant très bien choisis. En particulier un Tim Roth dont le talent n’est plus à démontrer mais qui, outre les trois phrases moisies qui lui sont dévolues, n’a pas vraiment le physique du rôle. Quant à Liv Tyler en scientifique de pointe no commentEdward Norton fait au mieux avec ce qu’on lui donne tandis William Hurt s’en sort honorablement dans un rôle en carton. Bref, comme un petit sentiment de confiture aux cochons, même si ces présences prestigieuses et le ton sérieux permettent au film d’échapper au statut d’indigent nanar façon Les 4 Fantastiques pour se contenter de n’être qu’un mauvais film sans saveur. Quant à la comparaison avec la version honnie de 2003, l’aspect dit "psychologique" me semble mieux traitée par Ang Lee et ses comédiens qui n’ont décidément pas à rougir devant ce triste avatar.

Après l’inattendu Iron Man doté d’un scénario à peine plus passionnant mais tout entier porté (détourné ?) par l’acteur et un réalisateur qui a la sagesse de le laisser faire, cette nouvelle mouture Marvel n’augure rien de bon. Elle démontre que la " fidélité" n’est pas nécessairement un gage de qualité et que la thématique des super-héros manque trop souvent de substance pour n’être confiée qu’à des réalisateurs dociles se contentant de filmer un storyboard conçu par une armada de scribouillards aux ordres.
Depuis le Superman de Donner jusqu’aux récents Batman de Chris Nolan en passant par Tim Burton et évidemment les X-Men de Bryan Singer, les producteurs devraient savoir que les réappropriations sévères de la part de cinéastes de caractère constituent la seule manière viable de porter à l'écran des histoires souvent simplistes et datées. Robby pas content.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu sais, je pense que n'importe quel réalisateur ou scénariste ne fera rien d'intéressant avec Hulk. Le concept de base est quand même celui d'un gros monstre bourrin vert. Que veux-tu faire de cela? Ce n'est pas étonnant si le comics ne propose pas de saga phare, que Leterrier ait pu prendre en considération.

Hulk, c'est tout simplement nul de manière générale.

RobbyMovies a dit…

Salut Yaneck,

Ce n'est pas faux en effet :D
Mais comme la tendance générale a été de comparer positivement cette version à celle de Ang Lee, quelle ne fut pas ma surprise de le trouver qq part encore plus mauvaise. Au moins celle de 2003 avait tenté de contourner en partie les faiblesses que tu soulignes par le biais d'un traitement des personnages plutôt intéressant, voire audacieux. Le résultat était soit un film raté, ou plutôt 2 films distincts qui ne pouvaient pas cohabiter : d'un côté un traitement "humain" à mes yeux honorable, de l'autre des scènes d'action foireuses.
Du coup je ne vois aucune raison de pavoiser avec celui-ci qui 5 ans plus tard flanche sur les deux tableaux pour ne livrer qu'un mauvais "Michael Bay like" sans aucune idée, tant visuelle que scénaristique. Et que c'est laid...

Robby

Anonyme a dit…

"les producteurs devraient savoir que les réappropriations sévères de la part de cinéastes de caractère constituent la seule manière viable de porter à l'écran des histoires souvent simplistes et datées"

Oui, mais comme en même temps c'est ce que beaucoup de monde semble reprocher au premier (que j'aime beaucoup), on s'en sort jamais... Normal que Marvel privilégie l'opinion la plus vaste donc, après tout ils ont une bourse à tenir. Alors si le "grand public" est content... peut-être, plutôt, ces réappropriations sauvages resteront-elles d'épars accidents de parcours ; si la norme devenait celle d'Iron Man, du grand spectacle familial bien emballé et pas con à défaut d'être fulgurant, ça serait déjà pas mal.

RobbyMovies a dit…

Heureusement, ces réappropriations ne sont pas encore des accidents de parcours, je trouve que pour le moment c'est assez équilibré.

Le truc finalement c'est que ça marche dans les 2 cas : les X-Men ça cartonne, The Dark Knight aussi, Iron Man itou, mais ce Hulk là aussi tout comme les effroyables Fantastic Four. Du coup on a droit à une sorte de roulette russe permanente sur la manière dont le thème va être traité par les producteurs : yesman pour ado ou cinéaste plus perso. C'est agaçant. :D

Et si on parle uniquement pognon, le succès colossal de The Dark Knight aura peut être une influence positive auprès des producteurs qui se posent encore la question...

Robby