samedi 2 avril 2011

La Disparition d'Alice Creed

Ça vous fait envie le premier film du scénariste de The Descent 2, tourné en vidéo HD avec un budget famélique ? Non ? Vous avez tort car cette Disparition est un petit bijou de cinéma de genre, méticuleusement réalisé sur une intrigue qui manie le rebondissement avec une réjouissante efficacité. Le tout avec seulement 3 personnages et un appartement (ou presque), on a envie de se lever pour applaudir ce petit-cousin teigneux du Limier ou de Piège Mortel.

Par égard pour le futur spectateur, il est préférable d'éviter l'évocation trop précise de cette histoire qui fonctionne beaucoup sur l'effet de surprise. Tout juste peut-on exposer le point de départ : 2 voyous préparent l'enlèvement de la fille d'un homme richissime afin d'obtenir une rançon. Ils mettent en œuvre un plan millimétré à mi-chemin entre l'expédition scientifique et le commando militaire : tout est prévu même le menu des repas, chaque geste est déterminé à l'avance, chaque étape s'imbrique à la perfection dans la suivante. Et puis évidemment l'imprévu surgit. Quoique…

Outre son scénario malin et jubilatoire, J. Blackeson signe là un premier film d'une remarquable maturité formelle : pas de place ici pour les grosses ficelles du cinéma fauché où l'on fait paresseusement trembler la caméra "pour faire vrai". Avec la même minutie qu'à l'écriture, le jeune cinéaste soigne chaque plan sans jamais sombrer dans une virtuosité affectée : tout y est limpide, fluide et parfaitement à sa place. Même la longue introduction muette évite l'effet gratuit tant elle est parfaitement en adéquation avec ce qui s'y déroule. La lumière suit la même logique : à la fois pure et discrète, elle enveloppe au mieux une image vidéo qui sait se faire oublier grâce notamment au superbe cadre en 2:35.

Avec un trio de comédiens qui fait figure de cerise sur un gâteau décidément savoureux, Blackeson montre qu'il est aussi un excellent directeur d'acteurs. Eddie Marsan campe un kidnappeur flippant par son obsession glaciale du moindre détail. On a peine à reconnaître le petit inspecteur Lestrade du Sherlock Holmes de Guy Ritchie.
En parvenant à insuffler une énergie folle à un personnage de victime pour le moins ingrat, Gemma Arterton montre qu'elle vaut infiniment mieux que les emplois ineptes auxquels elle est abonnée (Quantum of Solace, Le Choc des Titans, Prince of Persia, bientôt La Momie 4 !). Dans un rôle moins expressif, Martin Compston peine parfois à rivaliser avec ses partenaires, mais peu importe : l'alchimie fonctionne à plein et le trio promène impeccablement le spectateur du début à la fin.

Le magazine Variety classe en 2010 J. Blackeson parmi les 10 réalisateurs à suivre. En effet, après ce coup d'essai en forme de thriller économe et roboratif qui ne joue jamais la carte du clin d'œil référentiel ou du pré-formatage "culte", on attend avec une certaine gourmandise la prochaine œuvre de ce jeune auteur britannique dont l'irruption inattendue n'est pas sans rappeler celle de Danny Boyle. On lui souhaite le même succès.

1 commentaires:

dasola a dit…

Bonjour Robby, je confirme que ce "peit" film passé inaperçu est excellent. C'est un huis-clos très bien orchestré. A voir. Bonne journée.